Une syzygie du cœur, du corps et de l'esprit

Randonnée au Plateau de Bure

Lorsque Julie m’a fait part de son envie de voir les radiotélescopes du Plateau de Bure, je n’ai pas hésité longtemps pour rejoindre son projet d’y faire une randonnée bivouac. Le dispositif de l’IRAM est situé à quelques 2548 mètres d’altitude, dans le massif du Dévoluy.

Après avoir trouvé deux autres compagnons de route, il ne nous restait qu’à déterminer l’itinéraire à emprunter. Notre choix s’est arrêté sur la boucle passant par la combe de Mai pour la montée ; le retour se faisant par le pied du pic de Bure puis par la combe d’Aurouze. Le départ de la randonnée (1362m) se situe, quand à lui, au dessus de Montmaur, depuis un parking aménagé pas loin du Gite des Sauvas.

Samedi 12 septembre

Après une courte nuit et un café court, j’embarque les 15 kilos de mon sac à dos pour aller chercher le reste de l’équipe. Sur la route, nous traversons Grenoble, puis nous longeons le Vercors qui se dresse fièrement avec ses nuages accrochés à ses cimes.

Lors du dernier check-up et parce qu’il est annoncé de l’orage en milieu d’après-midi, nous intégrons deux tentes en prévision d’une nuit peut-être difficile. Et petit point important également, nous emportons chacun 4 litres d’eau car nous n’étions pas certain d’en trouver à la Fontaine du Vallon (1816m).

À 13h15 nous entamons la montée en empruntant le GR 84B et nous nous enfonçons rapidement dans la forêt.

À la sortie de la forêt, nous arrivons au Roc des hirondelles, là où le sentier va se muer en lacets. C’est au milieu de ces derniers et avec un peu d’avance, que l’orage a décidé de nous surprendre. Le temps d’enfiler nos coupes-pluie, nous étions déjà bien trempés. Il est 14h30 lorsque nous atteignons la Fontaine du Vallon, qui pour le coup n’était pas à sec.

Au niveau du petit bois, nous quittons le GR pour affronter la Combe de Mai. Et c’est là que les choses sont devenues compliquées. Le sentier qui était pourtant assez visible depuis le bas a vite disparu, nous laissant à nos incertitudes sur le chemin à prendre et sur les techniques à employer pour venir à bout de ce passage très technique et où la caillasse totalement meuble rendait inefficace la plupart de nos pas.

Vue de la Combe de Mai depuis l’orée du petit bois surplombant la Fontaine du Vallon

Il nous aura fallu plus d’une heure et demi pour atteindre le promontoire où nous feront une pause vitale à nos articulations, nos muscles et nos têtes.

Avec le recul, la pluie nous aura épargné une montée caniculaire. D’ailleurs, l’orage s’en est allé, comme il est arrivé, en avance.

Vue depuis le promontoire sur le haut de la Combe de Mai

Le reste de l’ascension se révèlera plus facile et nous aurons vite fait d’oublier les crampes et les douleurs lorsque la première antenne s’est offerte à notre vue.

Aussi étrange que cela puisse paraitre, nous ne nous sommes pas précipités directement vers les radiotélescopes, préférant escalader les derniers mètres nous séparant du plateau par la pente est. Une fois arrivés, nous avons pu apercevoir au loin le Pic de Bure, le second objectif de cette randonnée.

Le but de ce détour fût de déterminer quel lieu aurait été propice à un bivouac. Nous avons donc traversé le plateau du sud au nord, puis à l’extrémité s’est offert à nous un bien bel horizon.

Vint ensuite le moment d’aller à la rencontre des géants de métal. Et à peine avons nous emboité le pas, que ces derniers se sont mis à se mouvoir comme pour nous saluer.

J’ai ressenti une vague d’émotions en m’approchant puis en marchant à côté des antennes. Elles cristallisent mes croyances, mes questionnements, mes convictions, mes doutes, mes espoirs. Je ne savais pas qu’un tel dispositif existait pas loin de chez moi, et je rêvais des lointains ALMA et ATCA.

Avant d’entamer la session photo, nous avons déposé nos sacs sur un contrebas qu’on pourra qualifier d’herbu si on considère le reste du plateau. C’est d’ailleurs là que nous passerons la nuit, l’emplacement nous offrant un abris que nous avons estimé sûr et confortable.

La vue depuis mon duvet

Nous nous sommes accordées trois quarts d’heure pour immortaliser à notre façon ce moment et avant de passer au dîner.

Il y a deux photographes sur cette photo
Une syzygie de trois photographes

L’orage avait semble-t-il épargné le plateau, et nous décidons de ne pas monter les tentes pour profiter des étoiles. Après un repas rapide et un thé à la menthe, nous nous glissons dans nos duvets respectifs à la recherche du repos. Je n’ai cependant réussi à trouver le sommeil que durant deux ou trois heures en cumulé.

Dimanche 13 septembre

Les radiotélescopes en activité la nuit

5h du matin, les corps s’agitaient enfin pour faire écho au mouvement des radiotélescopes qui eux se sont mués sans interruption. Mes compagnons m’ont alors confié que je n’étais pas le seul à avoir passé une mauvaise nuit.

Le soleil commença à illuminer l’horizon puis l’extrémité ouest du plateau. La lumière semblait avancer à rythme soutenu en notre direction et bientôt nous allions pouvoir mettre à sécher nos duvets, matelas et autres accessoires sur les rochers illuminés.

Après le petit déjeuner à base de barres de céréales, nous avons fait encore quelques photos. Le projet d’atteindre le Pic de Bure commençait à devenir incertain tant la journée de samedi a été éprouvante pour les organismes. Nous nous sommes donné le temps d’arriver jusqu’au pied de ce dernier pour décider si on allait le faire ou pas. Pas de suspense inutile, on ne le fera pas.

À 10h30, nous nous sommes mis en marche vers le Pic. Nous observons des travaux pour prolonger la piste sur laquelle se déplacent les radiotélescopes. Une recherche rapide sur Internet nous confirmera qu’il est prévu la construction de 5 antennes supplémentaires d’ici 2021. Une bonne raison (supplémentaire) pour revenir non ? Nous faisons une dernière pause au pied du Pic afin de bien nous préparer avant la descente.

Et la descente ; parlons-en justement. C’était tout simplement vertigineux, et en particulier le passage nommé « Les marches », qui est une étape un peu aérienne. Avant les marches, il y a eu ce moment un peu fou où durant une dizaine de minutes nous sommes descendus en courant. Nous ne sommes arrêtés pour reprendre un rythme de marche que pour rejoindre l’autre versant de la Combe d’Aurouze et parce que le terrain devenait à nouveau plus délicat. Autant vous dire que nous n’étions pas mécontent d’arriver à la Fontaine du Vallon.

Nous rejoignons le parking en tout début d’après-midi. Après une collation bien méritée, il était alors temps de reprendre la route.

C’était une belle randonnée, très éprouvante mais l’expérience en valait la peine. Je ne suis toutefois pas certain de vouloir retenter une sortie avec un tel niveau de difficulté. Les conditions météorologiques ont été idéales. Le soleil et le ciel bleu de ce dimanche n’auraient pas été des compagnons appréciés lors de la montée.

Comme à chaque fois, une seule question se pose : quand est-ce qu’on repart ?

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